Comment
expliquer ce que l'on a ressenti, 10 jours durant, aux cotés de jeunes
roumains issus des quartiers défavorisés de Brad ?
La barrière de la langue. C'est
ce qui m'inquiétait le plus et pourtant elle se franchit aisément ;
d'une part certains enfants parlent un anglais très développé mais
d'autre part, je me suis rendu compte que pour faire rire, amuser ou
jouer, la parole est en fait secondaire… En effet, c'est l'attitude, le
comportement, qui priment. Un regard, un sourire ou même une posture
expriment souvent bien mieux nos pensées que de longs discours et je me
suis surpris à faire le clown devant une dizaine d'enfants dont les
sourires m'indiquaient un plaisir non discutable.
Car c'est en fait de ça dont il
s'agissait : leur faire plaisir ; en jouant au ballon, en faisant le pitre
ou en leur distribuant des jeux , ma fonction dans cette école (dont la
cour de récréation ressemble davantage à un terrain vague qu'à une
aire de jeux) ne faisait aucun doute. Ces enfants, mal nourris pour
certains, battus pour d'autres, me donnaient l'impression d'abandonner
leur quotidien, l'espace d'un après-midi.
Cependant, ils m'ont surpris bien plus
encore par le partage constant dont ils faisaient preuve ou par leur
concentration sur des activités manuelles car, ne l'oublions pas, ces
enfants sont en vacances. Certains d'entre eux, venant de la maison
d'enfants, m'ont également surpris par leur maturité comparativement
aux petits français du même age.
La surprise, l'agréable surprise, c'est
après coup le sentiment prédominant que j'ai éprouvé tout au long de
ces 10 jours. La parade de joie que ces gamins nous ont offert le premier
jour avait donné le La à mon séjour. Les quelques conflits auxquels
j'ai assisté ne suffiront pas pour effacer l'admiration que je voue à
ces Copii dont les rires resteront gravés à jamais dans ma mémoire. Ces
rires que j'aime tant sont, en fin de compte, ce que je garderai de ma
participation à la mission de Francine ; car, tel la misère, le rire est
universel, et, bien que n'effaçant pas l'horreur, il permet de l'oublier
durant des instants magiques.
Jules.