Découvrir un pays...
Quand j'ai annoncé à ma famille et à mes amis que je partais en Roumanie,
beaucoup on ouvert de grands yeux et récité une suite de clichés
accablant de la Roumanie et de son peuple. Pourtant, dès que je suis
arrivée à Bucarest, j'ai découvert un pays très différent de ce que je
pensais; les gens sont beaucoup plus chaleureux et souriant qu'on ne
l'imagine. Par la suite, alors que je cherchais le bus en direction de
Brad, un garçon a pris sur lui de m'aider et même de s'occuper de mon
bagage... Déjà, je sentais une chaleur humaine et une énergie à aller
vers l'autre que je ne connaissais pas, du moins, ce n'est pas en France
et encore moins à Paris qu'on rencontre une telle gentillesse envers un
inconnu, étranger qui plus est !
En plus de leur gentillesse, j'ai découvert un pays, avec ses coutumes et son
histoire, qu'on ne connait pas assez... L'héritage du communisme est
toujours tellement fort, et tant de gens vous racontent leur vie à cette
époque. La Roumanie est un pays qui a tant souffert, et ses plaies sont
loin d'être guéries....
Quand on s'occupait des enfants, Francine rendait visite à des familles. Les
familles que l'association parraine vivent dans une énorme misère et
connaissent souvent un drame familial, cependant, à chaque fois,
Francine revenait avec un cadeau, que ce soit un bibelot ou bien un
gâteau. Cette gentillesse et cette générosité m'a profondément touchée
car je sais qu'ils donnaient souvent tout ce qu'ils avaient.
Se sentir utile...
Depuis longtemps, l'idée de quitter mon cocon parisien où tout le monde se
regarde le nombril me taraudait, je voyais la misère à la télévision
mais n'avais jamais été confrontée à celle-ci. Il m'était très difficile
de savoir que je vivais dans un milieu privilégié alors qu'à quelques
kilomètres vivaient des gens dans une misère effroyable. Aujourd'hui, la
situation n'a pas changé, sauf que je sais ce qu'est la misère, ce n'est
plus un simple mot qu'on peut utiliser pour n'importe quoi.
Mon rôle ici a principalement été de m'occuper des enfants de la Casa de
Copii et du quartier durant des animations où nous (les jeunes)
prévoyions le déroulement avec l'aide de Mademoiselle Bouclette. Durant
les trois semaines que j'ai passées ici, j'ai donc vu les enfants tous
les jours de la semaine. J'avais très peur au début, surtout à cause de
la barrière du langage et du fait que je ne me sentirais pas à ma place,
ou plutôt que je ne saurais pas prendre ma place parmi des enfants qui
ont vécu déjà tellement pour leur jeune âge, j'avais peur d'apparaître
comme voyeuse à l'égard de leur misère... Mais là encore je m'étais
trompée. Ces enfants ne désirent qu'une seule chose : laisser leurs
problèmes à la porte de l'école où nous faisons l'animation. Dès le
lundi, une petite fille est venue, Andra, nous ne parlions pas la même
langue, et pourtant nous avons pu rire ensemble. Par la suite, j'ai
rencontré d'autres enfants aux histoires tristes et pathétiques et la
seule chose que je pouvais faire, c'était d'être là pour eux: leur faire
un câlin, un bisou ou bien leur tenir la main ; un geste simple mais
qu'ils ne reçoivent pas assez chez eux. Ce qui m'a le plus marqué, c'est
que l'affection qu'on leur apporte, les enfants ne la gardent pas pour
eux : ils sont toujours les premiers à « rendre un bisou » ou bien à
tendre la main. Ces enfants étaient réellement le reflet du peuple
roumain : malgré leur besoin et leur pauvreté, ils donnent tout ce
qu'ils ont.
Au cours de ce séjour, j'ai aussi pu suivre Francine au cœur de son action :
le parrainage des familles. Ici aussi, je redoutais le côté « voyeur »
des visites que je pouvais faire, et après en avoir discuté avec
Francine, je suis allée visiter deux familles. Je pense que c'est à ce
moment là qu'on réalise la pauvreté dans laquelle les enfants qu'on voit
à l'animation vivent. Il manquait une personne dans la première famille:
la mère avait quitté son mari et ses trois filles et ne montrait
aujourd'hui plus aucun intérêt pour ceux-ci. L'histoire de cette famille
m'a énormément touchée, d'autant plus que dans le drame, la famille
s'était ressoudée de façon fantastique. Dans la deuxième famille que
j'ai visitée, j'ai rencontré des personnes qui étaient directement
confrontées aux problèmes sociaux de la Roumanie : le père de famille,
ayant perdu ses deux jambes à la suite d'un accident de travail, ne
pouvait plus sortir de chez lui, habitant au deuxième étage d'un bloc
sans ascenseur, et qui par conséquent, ne pouvait pas accéder aux soins
nécessaires pour ses blessures sans que Francine s'en charge, car les
ambulances ne pouvaient le mener à l'hôpital... Ces deux familles m'ont
énormément appris sur l'attitude à avoir en tant que
personne privilégiée. Aujourd'hui, je sais que les témoignages à
la télévision ne sont pas que des cas isolés.
Apprendre sur mon rôle de citoyenne de demain...
Grâce à Francine, j'ai aussi eu l'occasion de visiter deux hôpitaux. Je dois
dire que j'avais peur de ce que j'allais voir, autant en ce qui concerne
les locaux, que la prise en charge des malades. Pourtant, j'ai été
agréablement surprise par l'hôpital de Deva. En effet, le Docteur Badao
a pris le temps de nous faire visiter l'hôpital et à montré un très
grand réalisme quand à celui-ci : certaines ailes sont certes
sophistiquées, mais il reste encore beaucoup de travail à faire pour que
les hôpitaux roumains soient aussi performants que les hôpitaux
français. J'ai aussi pu visiter l'hôpital de Brad, qui est en revanche
beaucoup plus pauvre et miséreux. De plus, j'ai découvert en Roumanie un
pays où tout s'achète, même dans l'éducation ou le milieu médical.
Il me semble aujourd'hui important d'avoir vu et compris cela. Je deviens
jour après jour un peu plus citoyenne, et il est indispensable que
chaque citoyen comprenne que son rôle est d'aider les autres et de
travailler pour que la corruption cesse de nuire à tout un pays.
Ce voyage m'a été très enrichissant. Il y a tellement de choses qu'on sait
sans vraiment les connaître ou bien dont on se cache, peut-être par
honte.
En venant ici, je voulais m'ouvrir à une nouvelle culture, mais pas de façon
purement consommatrice et touristique ; je voulais donner de ma personne
pour d'autres qui en ont besoin. Les gestes que j'ai accomplis ici sont
si simples, mais j'ai l'impression qu'on oublie de les faire en France,
et en Occident en général. Un bisou, ou bien une oreille pour écouter...
Seulement ici, ils n'ont pas la barrière matérielle et superficielle que
nous avons nous pour combler ce vide....
(Maintenant que je quitte le sol roumain, une question
me vient à l'esprit : ai-je fais assez ?)
Je tiens à remercier toutes les
personnes qui m'ont aidé durant ce séjour : Francine, pour son accueil ;
Mademoiselle Bouclette, pour son aide ; Sarah et les Scouts...
Maud