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Morgan
Scout - Toulouse |
Partir, c’était pour moi laisser un peu tout ce que
j’avais, tout ce que j’avais l’habitude d’être ou de faire. C’était partir
pour servir et me trouver au sein d’une démarche et d’un projet scout, mené
à cinq, depuis plus d’un an.
Nous sommes restés deux semaines au sein de l’association
et nous avions la charge d’animer les enfants, dans l’école de Brad.
Je me suis tout d’abord heurté à deux questions :
qu’allions-nous bien pouvoir faire auprès des enfants et comment communiquer
avec eux? Je crois que, malgré notre réflexion préalable et ce que Francine
avait pu nous dire, je ne me rendais pas vraiment compte de ce qu’allait
être notre réalité là-bas, à leurs côtés. Je n’imaginais ni pire ni mieux,
je n’imaginais pas vraiment.
Hortense, Sarah et Maud étaient déjà présentes, elles nous
ont permis de nous mettre très vite dans le bain. Les jeux sont partis,
mademoiselle Bouclette était là –heureusement- pour traduire l’essentiel des
consignes.
Le reste, malgré la barrière de la langue, ce qui est
vraiment essentiel, se disait au-delà des mots. C’était tout d’abord
apprendre l’un de l’autre. Se dire les couleurs d’un mur, lui en roumain,
moi en français. Tenter d’apprendre un jeu de carte roumain auquel je n’ai
compris que la règle principale. Pas toujours pratique pour jouer. Mais, au
fond, n’est-ce pas en cela qu’il fallait se comprendre, juste dans
l’essentiel ?
En bref, la communication passait quand même. La seule
chose, peut-être qui a pu être frustrante, c’est de n’être pas capable,
devant l’enfant, de lui parler, de lui dire ce que l’on ressentait, de ne
pas être capable de comprendre lorsqu’il vous parle de sa vie, de ce qu’il
vit de difficile, ou de ce qu’il vit de beau.
Notre mission, plutôt qu’une animation « à la française »
était, il me semble, plus d’être présent qu’autre chose. Les sortir de leur
quotidien bien souvent –pour ne pas dire toujours- difficile, par le jeu,
par une présence, un sourire.
Un jour nous avions maquillé les enfants, j’avais tant bien
que mal essayé de maquiller un petit garçon en « spiderman » comme il le
demandait. J’étais assez dubitatif devant le résultat mais lui, non. À les
voir ainsi émerveillés, on avait gagné la journée, et nous savons bien que
ça n’est pas, ou pas exclusivement, à cause de nos grands talents de
maquilleurs.
Nous avons pu voir, aussi, au cours de nos visites aux
familles, à quoi ressemblait le quotidien roumain. Souvent, en France, on se
contente de regarder de loin, de faire comme si l’on ne voyait pas. Et c’est
dommage. On ne changera pas le monde en claquant des doigts, non, mais on ne
le rendra pas plus beau en faisant semblant d’être aveugles.
J’ai pu voir qu’en donnant cinq minutes de notre temps, les
enfants transformaient ce trois fois rien en de grands moments. Par leurs
sourires, leurs rires, mais aussi par leurs peines.
J’ai pas mal appris le jour où je suis parti. J’ai vu
qu’ils allaient nous regretter, mais j’ai vu aussi que ceux qui seraient
après nous allaient nous remplacer et que, malgré ce que nous avions pu
apporter, l’œuvre allait continuer (et heureusement !). C’est une sacré dose
d’humilité. On leur a apporté un peu de distraction, peut être bien
davantage, pour certains, probablement nous auront-ils apporté plus encore.
On aura fait de notre petit mieux. En espérant que notre participation dans
l’association ait été un petit morceau de ce que domna Francine appelle la
goutte d’eau dans la mer qu’on tente de leur apporter.
Et pourvu que cette goutte d’eau soit une goutte d’espoir.
Morgan
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