Finalement Francine me permet d'utiliser son
ordinateur, j'opte donc pour les mails collectifs pour vous envoyer de
mes nouvelles. Les lettres c'est bien mais je n'aurais peut-être pas le
temps de vous écrire à tous comme je le voudrais...
Comme vous le supposez, je
pense, je suis bien arrivée à destination et suis super installée dans
la maison de Francine. Pour l'instant nous sommes toutes les deux...Je
ne sais pas où cette doamna (dame) de 73 ans puise son énergie : elle
reçoit des dizaines de jeunes endiablés toute la sainte année (elle est
animée par une foi inattaquable, peut-être est-ce cela) et il paraît
qu'elle n'est jamais fatiguée.
Mon voyage a été très agréable à
part un petit incident avant de partir : en me servant de ma carte visa
pour payer un truc, j'ai été pétrifiée par une crise d'amnésie de mon
code et mue par je ne sais quelle stupide obstination, j'ai fait 3 faux
codes...de ce fait je voyage sans carte visa (heureusement, j'ai pas mal
de liquide (enfin assez pour ici : j'ai donné 200 euros à Francine pour
mon séjour et pour vous donner un exemple, j'ai mangé avec elle au resto
hier soir ce qui m'a coûté 15 lei soit même pas 4 euros et en plus
c'était bon!).
Quand je suis arrivée à l'aéroport le sketch a
commencé, lever de rideau sur le théâtre roumain.
Je me suis dirigée vers le premier taxi de la file
: avant que je ne me sois mise à prononcer le moindre mot ce dernier a
jeté ma valise dans la malle de son auto puis s'est précipité derrière
son volant....Certainement que j'étais sensée faire une étude
comparative du prix de la course en m'adressant aussi à ses collègues
mais c'était trop tard...Vogue la galère avec ce gros pépère derrière
son volant. A peine étais-je installée qu'il me proposait d'ailleurs un
prix avantageux si j'acceptais de l'embaucher pour les 180 kilomètres
jusqu'à Brad ! Je lui précisai donc avec fermeté qu'il n'en était pas
question et que notre association s'arrêterait à la gare des bus...
L'homme était par ailleurs affable et a bien voulu commenter la
traversée de la ville se moquant visiblement de l'autorité qui y a fait
planter de jeunes palmiers - spécial grand froid il faut l'espérer ! La
course a coûté 50 lei soit un peu plus que ce que j'aurais dû payer mais
pas énormément. Me voici
donc pour deux heures à la gare des bus, un spectacle en soi à mon
arrivée dans cet affectionné pays (j'ai versé une larme d'émotion quand
les roues de l'avion ont rencontré le sol roumain). La gare est de forme
circulaire, propre, avec des sièges confortables. Il y a un petit
kiosque où l'on peut se procurer des trucs à grignoter, du café pour 1
leu, et autres boissons, un guichet information et de vente de billets.
L'attente se fait en musique, on se sent détendu. Parmi les voyageurs
l'on trouve tout aussi bien des dames très couleur locale avec des
foulards et des vêtements colorés, des jeunes filles habillées plutôt
provoc (disons sexy), des vieilles femmes fatiguées avec des sacs de
course en plastique, quelques hommes peut-être un peu éméchés mais
calmes... L'homme du guichet information vient plusieurs fois me voir
pour me redire que mon bus sera à tel endroit et à telle heure
(finalement taximan, bon joueur m'a recommandée au bon soin de ce
chevalier servant).
Vient l'heure d'embarquer. une file importante de
voyageurs s'apprête à monter dans le calme. Nous allons découvrir qu'il
n'existe aucun risque de ne pas être admis dans le bus. Au fil des
arrêts, les places assises sont toutes prises mais l'autocar sera rempli
jusqu'à la gueule et aucun passager ne trouvera à redire... (il paraît
que la législation est la même que dans le reste de l'Europe, mais je ne
suis pas au bout de mes surprises).
Ce trajet de 180 kilomètre en
musique lui aussi (j'ai même eu le loisir d'écouter un style paso doble
en roumain), est une bonne entrée en matière pour découvrir quelques
particularités roumaines sans compter un paysage qui deviendra
magnifique dans la deuxième partie du voyage.
- Passage à niveau : les
barrières sont baissées. On attend un bon quart d'heure le passage du
train. Les files de voiture s'accumulent de part et d'autre de cette
barrière. Beaucoup d'automobilistes et de camionneurs sortent des
véhicules et taillent le bout de gras...On a le temps d'admirer une
jolie chapelle, le minuscule cimetière mal désherbé, les traverses des
rails d'un autre âge et la rouille... un prunier qui ploie sous le poids
de la future tsuica (alcool de prune très prisée dans ce pays). Le train
passe enfin et la barrière est automatique ce dont je n'étais pas
absolument sûre. La pause st terminée chacun peut revenir à ses moutons.
- Observation du conducteur
moyen : le portable est grandement utilisé et avec beaucoup
d'enthousiasme (on n'entend pas ce qui se raconte mais il y a beaucoup
d'expression dans le geste).
- Chien errants : attention
cette gent est à tous les carrefours et ne fait guère attention en
traversant. La conduite me semble aussi dangereuse que le roumain me
semble fataliste. Dans le bus nous ne risquons rien puisque le chauffeur
a demandé la protection de la vierge à l'enfant (une image style en
relief à droite) de St Joseph (même chose à gauche) et du christ en
croix au milieu.
- Bouchons : avant la ville de Deva un bouchon
inexplicable s'est formé dans les deux sens nous immobilisant nous
immobilisant encore un bon quart d'heure de plus! Explication quand ça
redémarre : deux camion les quatre fers en l'air dans un fossé...
- Descente d'une passagère
solitaire au milieu de nulle part mais sur une route à grande vitesse et
circulation endiablée. Le bus s'arrête à peine sur le bord et ouvre la
soute à bagages côté route dans un tintamarre de klaxon : une vraie
roulette russe !
Plus nous approchons de ma destination, plus le
paysage est magnifique : vert vallonné avec de charmantes meules de
foins partout, des belles forêts de feuillus que j'aurai peut-être la
chance de voir se colorer en septembre... Une petite déception : Mais où
sont donc passés mes petits chevaux si vaillants tractant des équipages
aussi nombreux que variés ou improbables. Je n'en aperçois aucun. Ils ne
sont quand même pas tous passés en lasagnes de chez Spanghero, j'espère.
Francine vient me chercher à la
gare de Brad. Je suis vraiment contente de la retrouver. Nous allons
dîner dans un restaurant à Brad. L'endroit est très agréable avec une
belle terrasse et le plat que je choisis absolument délicieux. La
conversation s'engage très naturellement et je suis suspendue aux lèvres
de mon interlocutrice passionnante dans l'art d'expliquer ce qu'elle
fait, avec qui, pourquoi et comment. Ce qu'elle croit ce qu'elle
ressent... Qui sont les gens qu'elle aide, qui l'aide. Bref la soirée
passe à une allure inexplicable et nous gagnons sa demeure. Sachez dès
aujourd'hui que je suis très bien accueillie. Je vous décrirai la maison
prochainement car je dois aller me coucher (demain est une grande
journée : nous partons à 9 heures). Vous recevrez c'est sûr toutes ces
nouvelles en différé car ce que je commence à vivre ici est si dense que
je suis dans l'incapacité de tout vous relater au jour le jour...
A bientôt
donc.
Monique
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