Ce matin, nous allons
acheter 100 kilos de patates au marché pour les apporter au centre de
placement d'enfants de Brad. Il accueille 22 enfants qui ont de 3 à 17
ans et fonctionne avec une dotation mensuelle par enfant (1700 lei par
enfant et par mois : à diviser par 4.3 pour avoir la somme en euros). La
dernière fois que nous avons rencontré doamna Lili, la Directrice, elle
nous a fait part de ses préoccupations : la dotation n'a pas été
attribuée ou du moins pas à l'échéance habituelle ce qui fait que
l'économat n'a pu acheter des pommes de terre pour nourrir les enfants.
Aujourd'hui, elle nous apprend dans le même ordre d'idée qu'il n'y a
plus de confiture. A signaler aussi qu'elle a demandé à Francine une
somme d'argent pour permettre à 8 enfants qui partaient à la mer d'avoir
un peu d'argent de poche pour leur séjour. (A noter que le séjour à la
mer est gratuit pour le foyer mais qu'il n'y a qu'un seul pseudo
éducateur qui accompagne les 8 enfants ???
C'est ainsi que l'association
dont Francine s'occupe, aide des enfants qui vivent sous le toit
familial, mais doit aussi à l'occasion palier aux manques
incompréhensibles de ce pays! Dans le même ordre d'idée, nous avions
également appris en visitant une famille bien bien en dessous du seuil
de pauvreté que l'on peut rencontrer en France (je vous décrirai
plusieurs de ces situations c'est inimaginable), que l'argent des
bourses et l'aide pour prendre le micro bus scolaire n'avaient pas été
versés l'année précédente, et, que pour cette rentrée il se faisait
toujours attendre...
Le centre de placement visité aujourd'hui comporte
des locaux relativement corrects (8 enfants par chambre mais c'est une
grosse amélioration par rapport aux situation connues antérieurement) ce
qui n'exclut pas certains problèmes au niveau de la prise en charge des
enfants. Francine me dit que certains d'entre eux étaient en famille
d'accueil mais que ces famille d'accueil ont choisi de quitter le pays
pour aller travailler à l'ouest dans l'espoir d'un avenir meilleur, d'où
l'orientation des enfants vers ce foyer.
Parmi les problèmes dès à
présents identifiés :
- le personnel n'est pas formé et l'effectif
insuffisant. De ce fait l'association de Francine finance deux postes
pour améliorer la situation : un poste de femme de service et un poste
qualifié (profil pédagogue, assistante sociale, puisque la formation
d'éducateur n'existe pas. A noter que les études d'assistante sociale
sont accompagnées d'un module en théologie ce qui va faire sourire
certains ou certaines).
- les activités avec les enfants sont quasi
inexistantes, d'une part parce que le personnel n'est pas très motivé,
d'autre part par manque de moyen. (il existe par exemple un petite
cuisine qui pourrait servir à faire des gâteaux avec les enfants mais il
semble qu'il n'y ait pas suffisamment de crédit pour ne serait-ce
qu'acheter les ingrédients nécessaires à la confection de ces gâteaux).
Ce matin donc, nous sommes
arrivées au centre avec nos pommes de terre et j'ai participé au jury de
recrutement d'une jeune femme qui se présentait pour devenir
"éducatrice" au centre de placement. J'étais crevée à la fin de
l'entretien : doamna Lili parle à 300 à l'heure et je me suis accrochée
comme une dingue pour comprendre à peu près quelque chose... Je m'en
sors assez bien. En fait cela dépend des jours... Si j'entends et parle
du roumain toute la journée je finis par être bien à l'aise mais dans la
voiture avec doamna
Francine, on a quand même pas mal parlé Français donc...Tout cela pour
vous dire que la jeune femme a été recrutée et qu'elle sera payée un peu
plus de 900 lei pour 40 heures par semaine dont des week-end.
Après le déjeuner que nous
prenons toujours un peu tard (les roumains mangent souvent vers 14 ou 15
heures et parfois pas le soir), je me suis proposée d'aller faire une
petite ballade pendant la sieste de Francine, et, suis tombée dans la
rue sur domnasoara Bouclette qui venait de mettre des fleurs dans le
monastère franciscain de Baia de Cris : elle fait cela tous les
vendredis bien qu'il n'y ait
plus aucun culte célébré dans l'église (sauf
exceptionnellement à Noël ou lorsque des représentants de l'ordre des
templiers viennent y séjourner). Bouclette m'a proposé de visiter ce
monastère très ancien.
Elle me raconte qu'en 1952, 40 Franciscains chassés
de quelque part par le régime en place, ont été assignés à résidence
obligatoire dans ce monastère et que cette situation a duré pour eux 6
mois. Six mois pendant lesquels la population de Baia de Cris semble
avoir déjoué par la ruse la vigilance de la sécuritat pour porter
secours à ces personnes qui vivaient dans le dénuement...C'est peut-être
pour cela qu'elle continue à fleurir l'autel de l'église désaffectée (il
n'y a que 2 catholiques à Baia de Cris) car Bouclette a actuellement 63
ans et garde un souvenir très robuste de toute cette funeste période.
Nous sommes montés à la tribune et à tour de rôle avons exercé notre
voix pour tester l'acoustique qui est absolument incroyable. Nous avons
donc décidé de revenir là une autre fois avec des partitions pour de
nouveau chanter.
Je rectifie un petit truc que j'ai écrit hier
concernant les religions sous le régime communiste : la religion
romano-catholique était également tolérée (sans doute pour des raisons
politiques car en Roumanie les fidèles de ce culte appartiennent en
grande partie à la minorité hongroise).
Si j'ai le temps de vous écrire
demain ce sera pour vous parler de nouveau de mon voyage à travers la
ROUMANIE.
Monique
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