C’est
dimanche aujourd’hui, jour de baptême de Madelin-Ladislao ;
Autour
du berceau se pressent 4 bonnes fées, mais une seule a été choisie
comme première "NACA" (marraine), Francine, reconnue ainsi
par le village, honneur pour la famille.
Vois-tu
Madelin-Ladislao, le bien-né, ton étoile scintille en ce jour, sais-tu
pourquoi ?
Car
tu es la graine bénie de ton père, qui t’as désiré fort, si fort
que ta mère l’a entendu, puis dans son ventre elle t’a fait
fructifier.
L’église
qui t’a reçu, n’avait pas baptisé d’enfants depuis si longtemps
dans ce petit village de Roumanie, que chacun a lu le bon présage dans
cet événement.
Tes
grands-parents au complet sont présents ainsi que ta famille, réjouie
que tu sois un garçon.
Tu
dors dans ton berceau rose à fleurs, paisiblement, pendant que la
musique nous enveloppe et nous enserre.
Sous
ton oreiller, chacun a glissé de l’argent afin que tu grandisses et
prospères.
La
"TUICA", enflamme les gosiers, les yeux chavirent, les visages
s’éclairent, les langues claquent de plaisir.
Tradition
oblige, pas de place pour tes parents à table aujourd’hui.
Ils
sont tout à l’écoute de leurs invités et les servent généreusement.
Ici,
le lien est solide, famille et voisins sont à la tâche, ensemble
depuis des jours pour la confection du repas.
Les petites filles de rouge et de rose vêtues, princesses éphémères,
se démènent sur la piste de danse.
Un jour, Madelin-Ladislao,
Francine te racontera la vie de ta grand-mère Juliana et de ton grand-père
Bogdan et saisi de stupeur, l’histoire de la mine te sera révélée
ainsi que celle de milliers de femmes et d’hommes perdus au fond du
gouffre noir.
Noir, tu l’es toi même par moitié, petit fils de mineur et
petit fils de tsigane.
Il n’y a plus de charbon, la terre s’est épuisée de son or
noir, ne restent plus que ses traces sur le paysage de désolation.
Tu es issu de là, Madelin-Ladislao et entouré de fière
tendresse, tu vas grandir dans ce confort nouveau que tes parents vont
s’acharner jour après jour à te procurer.
Sois heureux… et souviens-toi,
que tout de blanc vêtu et recouvert de dentelles tu n’as pas pleuré
sur les fonds baptismaux…
Sois heureux… souviens-toi
Madelin-Ladislao et pleure !
Renata Algeo